• Marcel Moreau - Beffroi

        Aussitôt, la grande ville happe Beffroi, veut le noyer (dans ses foules). Il se regimbe. Entre elle et lui, c'est la lutte, ahon ! Au premier contact, ils roulent tous les deux dans les pierres, corps mêlés, La ville lui envoie des feux, des autos dans les yeux. Des banques immenses lui font face, des sièges de multinationales aux poitrines énormes, lumineuses. Les rues sont larges, envahies. Il riposte à tous ces coups, après une miction brûlante contre le seul arbre du quartier, par un grondement. Il prend au hasard les rues, étonné d'y voir si peu de fauves. Il se tourne alors vers les bistrots, cancers néonesques alignés le long d'un boulevard. Il a soif. Il n'a pas bu depuis dix, vingt munites, ahon ! Ai faim aussi, mangerai pain, beurre, œufs. Mais à l'intérieur, tout est mort. Beffroi décrète que tout est mort : les verrtes ne tintent plus, un silence liquide s'écoule lentement dans les gosiers d'on dirait des pendus. Des dents sortent doucement de visages, sautent dans l'espace, s'accrochent un insant, <i>là</i>. On appelle ça rire. Une femme qui a nom Jenny s'agrippe au comptoir, lequel brille. Elle a ls eins bruns, griffés et elle geint.  Un sac lui bat les flancs. Beffroi mange, la dévore des yeux. il la veut soûle, soudain, et tout à lui, pendant une heure. es longs bras poilus lui entourent le cou. De nouveau le même rythme étrange le saisit. Ici, c'est comme un furieux roulement de tambour. Un premier roulement de tambour exaspéré par la chaleur. Jenny s'effondre, en sueur. Il est sur elle, poussé par une sorte de musique odieuse.

    Marcel Moreau, A dos de dieu
    ou l'Ordure lyrique, chap. VI, p.37
    Luneau Ascot Editeurs, Paris, 1980.


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